L’analyse du sol est un outil précieux pour comprendre la santé de son jardin ou de son potager, adapter ses pratiques de culture (rotation des cultures, amendements et fertilisation), favoriser la croissance des plantes et limiter l’impact des maladies. Connaître les caractéristiques de son sol contribue à optimiser la productivité de son jardin tout en maîtrisant les problèmes potentiels qui leurs sont liées.
Cet article aborde les différentes méthodes d’analyse du sol à la portée des jardiniers.
Pourquoi analyser le sol
L’analyse du sol est utile pour aider les jardiniers à adapter leurs pratiques de gestion du sol de manière à créer des conditions optimales pour la croissance et la santé des plantes. Elle va les aider à :
- Comprendre la composition du sol : L’analyse du sol permet de déterminer la composition du sol en termes de texture (argileuse, limoneuse, sableuse), de pH, et de nutriments essentiels (azote, potasse, phosphore).
- Évaluer sa fertilité : La fertilité du sol dépend de la disponibilité des nutriments nécessaires à la croissance des plantes. L’analyse du sol aide à identifier les carences ou les excès de nutriments.
- Adapter les cultures : Différentes plantes ont des exigences spécifiques en matière de sol. En comprenant la composition du sol, le jardinier peut choisir des plantes qui prospéreront naturellement dans ces conditions ou apporter des amendements pour les adapter.
- Prévenir les problèmes de croissance liés à la contamination du sol : une analyse approfondie du sol (hors de portée du jardinier) peut révéler des problèmes potentiels tels que la salinité, la présence de métaux lourds ou d’autres contaminants qui pourraient affecter la croissance des plantes.
- Économiser de l’argent : En appréhendant les besoins du sol de son potager, le jardinier peut éviter l’utilisation excessive ou inutile d’engrais et d’amendements.
La connaissance du sol permet d’adapter ses pratiques de jardinage. Selon les types de sols, le jardinier ne va pas intervenir de la même manière. L’apport de matière organique par exemple ne se pratique pas de la même manière en sols argileux, dans lesquels elle est difficile à incorporer, que dans un sol sableux/limoneux, qui est meuble par nature et dans lesquels la vie du sol arrive bien à intégrer la matière organique sans trop de travail mécanique.
En matière d’arrosage, les sols légers retiennent très peu l’eau et nécessitent un arrosage soutenu, tandis que les sols argileux arrivent à stocker suffisamment d’eau pour limiter les arrosages.
Les sols argileux se réchauffent lentement au printemps. Les cultures ont souvent du mal à démarrer en début de saison, tandis que les sols sableux, eux, se réchauffent très vite.
Comment analyser le sol
Utilisation des plantes bio-indicatrices
Certaines plantes sauvages se développent dans certaines conditions très précises de sol : pH, teneur en élément fertilisants et matière organique, humidité, tassement, éléments polluants, …
Bien qu’intéressante, la méthode consistant à identifier les plantes bio-indicatrice pour déterminer la qualité de son sol n’est pas facile à utiliser dans le cas d’un potager. Il faut en effet que la plante couvre au moins 70% du sol pour être une indicatrice fiable de sa qualité. Toutefois, la présence récurrente de certaines plantes indésirables, comme le liseron, le chiendent, les oxalis peuvent se révéler être de bons indicateurs (voir un guide sur les plantes bio-indicatrices)
Collecte d’échantillons
Pour les méthodes qui suivent, il faut prélever des échantillons de sol dans différentes parties du potager ou de la parcelle à analyser, à la même profondeur (en général 10cm) pour obtenir une représentation moyenne du potager ou de la parcelle.
Analyse de la texture et de la composition du sol
■ Triangle des textures
Utilisé pour appréhender la nature du sol.
Méthode
- Remplir à moitié une bouteille ou un bocal étroit en verre blanc avec la terre
prélevée
- Compléter avec de l’eau, boucher et secouer énergiquement pendant 3 à 5 minutes, jusqu’à ce qu’il ne reste plus de gros morceaux de terre.
- Laisser reposer 24h et mesurer la hauteur du dépôt à l’aide d’une règle. Mesurer aussi la hauteur de chaque couche qui est apparu, successivement du fond à la surface : sable et graviers, limons, argile, matière organique. Calculez le pourcentage représenté par chaque couche, et se référer au graphique ci-contre pour trouver la nature de votre sol
Dans la couche supérieure des éléments sédimentés se trouvent les débris végétaux. Leur présence donne une bonne indication des réserves en matières organiques du sol. De plus, plus l’eau est trouble, et plus la réserve organique est importante.
■ Test de plasticité, méthode du boudin
Utilisée pour appréhender la teneur en sable ou en argile.
Méthode
Rouler de la terre mouillée dans les mains. faire un pâton d’environ 10cm de long et du diamètre d’un crayon. Observez le comportement du pâton :
- si le pâton se tient : il contient au moins 10% d’argile, sinon le sol est à prédominance sableuse (moins de 10% d’argile),
- si on peut courber le pâton en croissant sans qu’il se casse le sol contient au moins 15 % d’argile
- si avec le boudin on peut faire un anneau qui ne se désagrège pas et reste lisse, on a à faire avec un sol argileux ( plus de 50% d’argile), sinon le sol est plutôt limoneuse (autour de 30% d’argile).
■ Mesure du pH
On peut utiliser un kit de mesure du pH que l’on trouve en général en jardinerie. Faciles à utiliser, ces kits donne en général un bonne évaluation du pH (sans chiffre après la virgule !). Les pH-mètres électroniques bon marché que l’on trouve en jardinerie ou sur internet ne sont en général pas fiable et sont à éviter.
Autre méthode
A défaut de kit, on peut avoir une idée approximative du pH en procédant avec du vinaigre blanc et du bicarbonate de soude :
- Tapisser le fond de 2 verres ou autres récipients transparents sur une hauteur d’un tiers du contenant avec la terre récoltée
- Dans le premier verre, ajouter du vinaigre blanc en quantité suffisante pour mouiller la terre. Mélangez . Si une mousse apparait ou une effervescence se produit, la terre est basique. Plus la mousse est importante et plus le pH est élevé
- Dans le second verre ajouter de l’eau (distillée ou de pluie) pour obtenir une consistance de boue. Ajouter une cuillère à café de bicarbonate de soude et mélanger. Si une mousse apparait ou une effervescence se produit, la terre est acide. Plus la mousse est importante et plus le pH est bas.
- Si aucune mousse ou effervescence ne se produit dans aucun des 2 récipients, alors votre terre est neutre.
■ Mesure des éléments nutritifs
■ Mesure de la matière organique
La mesure de la teneur en matière organique est assez complexe. Elle se fait par comparaison du poids d’un échantillon de terre sèche avant et après passage pendant 5h dans un four à 450°C. La perte de masse observée est attribuée à la matière organique : le poids de matière organique est obtenu par différence entre le poids total et le poids de cendres résiduelles.
On peut toutefois en avoir simplement une idée avec le test de l’eau oxygénée
Méthode de l’eau oxygénée
Déposer, à l’aide d’une pipette, quelques gouttes d’eau oxygénée (à 35% ou 12%) sur une poignée de terre étalée au fond d’un verre. Observer la réaction, qui se manifeste sous forme de bulles, du fait de l’oxydation de la matière organique par l’eau oxygénée, dont le comportement signifie :
- effervescence immédiate et courte: signe de matières organiques très azotées et peu carbonées
- effervescence tardive : beaucoup de carbone et peu d’azote
- une effervescence longue et continue: matière organique équilibrée pour son rapport carbone/Azote (C/N, voir l’article)
■ Mesure de l’activité biologique
– Vers de terre
Le nombre de vers de terre est un bon indicateur de la qualité biologique d’un sol, notamment de sa teneur en humus. On peut utiliser deux méthodes pour les dénombrer.
Méthode de la bêche
Cette méthode consiste à prélever dans le sol , entre janvier et avril (période d’activité maximale des vers de terre), six blocs de terre de 20x20x25 cm, 25 étant la profondeur, puis de trier les vers de terre dans chaque bloc et les compter. On ramène le nombre de vers au m2 en multipliant le nombre de vers obtenus par 4.
Méthode de la moutarde
Cette méthode permet de dénombrer le nombre de vers de terre de manière plus précise et plus rapide que la méthode de la bêche. Malgré son caractère spectaculaire, elle est sans danger pour les vers.
Son principe est simple : il suffit d’isoler avec un cadre en tasseaux de 1×1 m trois zones de 1m2 (pour la représentativité du comptage) dans le jardin et de les arroser chacune d’un mélange composé de 10 l d’eau et de 300 g de moutarde (Amora fine forte). La molécule irritante présente dans la moutarde fait remonter les vers à la surface et il suffit de les prélever et de les compter. Une fois comptés, les vers de terre sont rincés dans de l’eau claire et remis dans le potager hors des zones traitées en les couvrant éventuellement d’un paillis végétal pour éviter qu’ils ne se dessèchent. Le facteur irritant de la zone traitée disparait en quelques heures.
Une terre fertile contient un minimum de 200 vers par m2. Un potager bien entretenu peut héberger jusqu’à 600 vers par m2.
– Micro-organismes
On ne peut évaluer l’activité biologique des micro-organismes du sol que par voie indirecte.
Méthode du slip (ce n’est pas un gag !)
On enterre verticalement un slip en coton non coloré dans le sol , l’élastic devant affleurer la surface. L’élastic ne se dégrade pas et aidera à retrouver le slip. On retire le slip au bout de 3 mois et on évalue l’activité biologique à partir du niveau de dégradation du slip (image ci-contre). En général, celui-ci ne peut pas retourner à son usage initial …
Voir la méthode détaillée (fiche ADEME)
Méthode du sachet de thé
Enfouir, à plusieurs endroits de votre potager, un sachet de thé vert que vous aurez préalablement pesés à l’aide d’une balance de précision . Attention, les références à utiliser sont spécifiques. Les enterrer 90 jours à 10 cm de profondeur, puis les retirer, bien les sécher et les peser à nouveau. La différence de poids indique le niveau de dégradation et donc la vigueur de l’activité biologique. En savoir plus sur cette méthode.
Annexe : caractéristiques agronomiques des différents types de sol
Sol argileux : Aspect compact, collant lorsqu’il est humide, très dur et fendillé lorsqu’il est sec.
- Avantages : retenant bien l’humidité et les nutriments. Ce type de sol peut être productif s’il est correctement enrichi en éléments nutritifs.
- Inconvénients : il peut être difficile à travailler et s’engorge vite lors de fortes pluies. Sa compacité empêche une bonne circulation de l’eau et de l’air, un enracinement profond. Ce type de sol se réchauffe lentement au printemps, occasionnant un retard de la végétation.
Sol limoneux : Aspect doux au toucher, poudreux lorsqu’il sèche.
- Avantages : très fertile, il est facile à travailler et à aérer, propice au bon développement des plantes.
- Inconvénients : structure fragile, il a tendance à former une croûte de battance sous l’effet de la pluie et des arrosages.
Sol humifère : sol plus ou moins spongieux, léger, il est de couleur sombre.
- Avantages : ce type de sol riche en matière organique, fertile, retient bien l’eau, facile à travailler, se réchauffe rapidement, favorable à la vie microbienne.
- Inconvénients : le risque d’acidité de ce type de sol peut limiter ou empêcher la plantation de certains végétaux.
Sol sableux : granuleux au toucher, sans cohésion.
- Avantages : toujours bien drainé, facile à travailler, se réchauffe facilement.
- Inconvénients : Faible rétention d’eau, faible teneur en nutriments. Dépourvu de matière organique, il est facilement lessivé lors de l’arrosage ou des pluies. Il doit donc être fréquemment amendé pour rester fertile.
Sol calcaire : sol blanchâtre d’aspect crayeux, terre souvent légère.
- Avantages : perméable à l’eau, il se réchauffe rapidement, résiste à l’acidification
- Inconvénients : le calcaire peut entraîner des problèmes de disponibilité des nutriments, limitant pour certaines plantes acidophiles. Ce type de sol doit être fréquemment amendé. Sec en été, il est facilement boueux en cas de pluie.