Les gastéropodes terrestres (escargots et limaces) jouent un rôle écologique crucial en décomposant la matière organique et en enrichissant le sol. Cependant, bien que leur présence soit bénéfique pour l’écosystème global, ils deviennent indésirables au potager en raison des dommages importants qu’ils peuvent causer aux cultures.
L’hiver doux et le printemps chaud et humide que nous avons connu cette année a facilité leur prolifération. En effet, ils n’ont pas hiverné et la reproduction a commencé beaucoup plus tôt en saison. Des accouplements d’escargots ont été notés en avril, soit avec quasiment deux mois d’avance.
Le rôle écologique des gastéropodes
Les gastéropodes jouent un rôle écologique important dans le cycle des nutriments. Ils contribuent à la décomposition de la matière organique en consommant des déchets végétaux et des champignons, enrichissant ainsi le sol en éléments nutritifs essentiels. Ils servent de nourriture à divers prédateurs tels que les oiseaux (merle, grive, canards, poules), les amphibiens (grenouilles et crapauds), les mammifères (hérisson, musaraigne) et les insectes (carabes). Ils jouent donc un rôle crucial dans la chaîne alimentaire, contribuant ainsi à la biodiversité.
Par ailleurs, la présence et l’abondance des escargots et des limaces peuvent servir d’indicateurs de santé de l’écosystème. Leur sensibilité aux changements environnementaux, tels que la pollution, les modifications de l’habitat et les changements climatiques, en fait des bio-indicateurs utiles pour les écologistes.
Comportement au potager et dégâts occasionnés
Au potager, les gastéropodes peuvent causer des dégâts considérables en période humide. Ils sont principalement nocturnes et se cachent pendant la journée sous les pierres, les feuilles et autres abris. Les escargots et les limaces se nourrissent en râpant les feuilles et les jeunes pousses avec leur langue râpeuse, appelée radula (équipée de 2000 dents !). Leur prédation crée des trous irréguliers et des bordures déchiquetées sur les feuilles, réduisant la surface photosynthétique et affaiblissant la plante.
Ils consomment une grande variété de plantes, préférant les jeunes pousses tendres et les feuilles, ce qui peut ralentir la croissance des plantes et même les détruire complètement. Les jeunes plantules sont particulièrement vulnérables, car les gastéropodes peuvent consommer une plante entière en une seule nuit. Cela peut entraîner la perte totale de jeunes semis avant qu’ils n’aient eu la possibilité de se développer.
Les gastéropodes attaquent également les fruits et les légumes mûrs, laissant des trous et des traces de mucus. Les tomates, les fraises et les courgettes sont particulièrement prisées, notamment par les limaces.
Enfin, les gastéropodes peuvent être vecteurs de maladies fongiques, bactériennes et virales, qu’ils transmettent en se déplaçant d’une plante à l’autre. Par exemple, ils peuvent propager le mildiou et d’autres maladies fongiques.
Méthodes biologiques de contrôle
Le jardin est un écosystème idéal pour les gastéropodes, qui y trouvent gite et couvert. Pour gérer leur population de manière écologique, plusieurs stratégies peuvent être employées, favorisant une approche intégrée et durable. Mais leur efficacité est assez aléatoire et dépend beaucoup du niveau d’infestation et des conditions météorologiques.
Gestion du Jardin
Le maintien d’un jardin propre et bien entretenu est un premier moyen assez efficace de limiter les populations de gastéropodes :
- griffer la terre sur 10-15cm en fin d’hiver pour mettre à nu les oeufs de limaces et les détruire
- enlever régulièrement les débris végétaux, les mauvaises herbes et les résidus de culture qui peuvent servir de refuges aux gastéropodes.
- limiter les zones humides, notamment les bâches plastique, les planches, briques et tout autre matériau offrant des abris.
- biner régulièrement le jardin pour limiter la progression des gastéropodes et détruire leurs oeufs
- ne mettre en terre que des plants déjà bien développés et plus résistants
- favoriser la biodiversité en aménageant des refuges pour les prédateurs des gastéropodes
- créer une zone de déchets pour fixer les gastéropodes. Y mettre les déchets du jardin qui leurs serviront de repas, ce qui évitera la visite plus étendue et risquée du jardin. On peut aller jusqu’à leur réserver une petite parcelle de quelques m2 plantée de crucifères.
Mise en place de barrières physiques
Plusieurs méthodes non dommageables pour les autres êtres vivants du potager, mais plus ou moins efficaces, peuvent être mises en place.
- Cendres, coquilles d’œuf broyées et marc de café : Disperser des cendres de bois (image ci-contre) ou des coquilles d’œuf broyées (non cuites, plus efficaces) autour des plantes vulnérables. Les surfaces poudreuses et rugueuses sont difficiles à traverser pour les limaces et les escargots. La paille broyée finement ou le paillage de chanvre sont également efficaces. Ces méthodes ne fonctionnent que s’il ne pleut pas. L’utilisation de la cendre de bois n’est pas conseillée dans les terrains calcaires (voir l’article). Dans ce cas utilisez plutôt de la sciure.
- Bandelettes de cuivre : Installer des bandelettes de cuivre autour des plates-bandes et des pots. Le cuivre réagit avec le mucus des gastéropodes, créant une sensation électrique inconfortable qui les dissuade de traverser. Il existe aussi un filet en cuivre permettant de créer une barrière physique (le filet anti limace Springday).
- Bandelettes de tissu enduite de graisse minérale fortement salée : cette méthode est utilisée par les héliciculteurs pour éviter la fuite des escargots de leur parc et est relativement efficace pour protéger de petits espaces
- Toile Insecticide : Utiliser des voiles anti-insectes pour empêcher les gastéropodes d’accéder aux cultures. Les bords du voile doivent être correctement enfouies dans le sol pour éviter que les gastéropodes se glissent dessous. On peut aussi utiliser des cloches de forçage ou des bouteilles plastique sans fond pour protéger individuellement les plants fragiles.
Piégeage
Installer des pièges à bière pour attirer et noyer les gastéropodes (image ci-contre).
Placer des planches ou des pierres que les limaces utiliseront comme abris, puis les récolter et les éliminer régulièrement. La récolte des escargots peut se faire de nuit lors des soirées pluvieuses. Il suffit ensuite de les relâcher là où ils ne peuvent pas faire de dégâts (pas chez le voisin !). Cette méthode est plus difficile à utiliser pour les limaces, plus difficiles à repérer et à prélever.
A noter que les escargots récoltés de l’espèce helix aperta (petit gris) peuvent être élevés dans des petits parcs biens clos jusqu’à leur taille adulte pour les consommer en les nourrissant avec de l’aliment pour poules pondeuses broyé et en maintenant le parc humide via des arrosage nocturnes.
Plantes répulsives
Certaines plantes dégagent des composés chimiques qui éloignent les gastéropodes, comme l’ail, l’oignon, la capucine, la sauge, le thym, la consoude. Elles peuvent être utilisées pour créer une frontière autour des petits espaces à protéger ou dispersées dans le jardin pour créer une diversion olfactive.
La fougère peut être utilisée en paillage autour des jeunes plants, ou sous forme de purin pulvérisé sur les plantes à protéger. Le purin de rhubarbe serait également efficace en répulsif. L’ail peut être utilisé en répulsif sous forme d’infusion pulvérisée sur les plantes.
Utilisation de la lutte intégrée
- Prédateurs : Les carabes, les crapauds, les hérissons font partie des prédateurs des limaces et escargots. on peut les attirer au potager en leur offrant un habitat adapté : un hôtel à insectes pour les carabes, un point d’eau pour les crapauds et les hérissons.
- Nématodes : des nématodes parasites (Phasmarhabditis hermaphrodita), qui sont des vers microscopiques, attaquent et détruisent les limaces et les escargots sans affecter d’autres espèces. Ils s’utilisent en traitant le sol. Leur coût est conséquent (environ 1€/m2) et leur utilisation est à réserver aux fortes infestations, notamment de limaces; ils sont moins efficaces sur les escargots, qui ne vivent pas dans le sol.
Utilisation de produits spécialisés
Les granulés anti-limaces contiennent deux composants essentiels : un agent chimique toxique pour les limaces (métaldéhide, phosphate de fer, methiocarbe) et des substances nutritives qui les attirent. Les limaces se laissent tenter par les aliments contenus dans les granulés et absorbent ainsi le poison. Un agent donnant un goût amer évite la consommation du granulé par les animaux ou les enfants car ces produits sont très toxiques.
Les produits à base de métaldéhide ou de méthiocarbe sont à éviter car ils sont très toxiques pour les animaux et le métaldéhide contaminent les eaux. Le produit chimique utilisé dans les produits dits bio (Ferramol et autres dénominations commerciale) est le phosphate de fer. Mais ce produit est toxique à forte dose pour les vers de terre et les animaux qui les consomment (hérisson, taupes, oiseaux). Les conditions d’emploi et les doses indiquées doivent donc être rigoureusement respectées.
L’utilisation de produits chimiques, même bio, peut détruire effectivement les gastéropodes, mais limite de fait le nombre de leurs prédateurs. Lorsqu’on commence à utiliser ces produits, on est donc condamné à continuer.
Les produits bio ont des effets délétères limités s’ils sont bien utilisés, mais dire que leur emploi est sans incidence sur la biodiversité animale parait pour le moins abusif. Donc ils sont à utiliser ponctuellement et en dernier recours
Et pour finir sur le sujet, une citation d’Hervé Covès sur le sujet : “La destruction permet de ne plus voir le problème. Mais elle ne règle pas le problème”.
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